Ta #série, toi et nous : Parks and Recreation

19 Avr

Parce que c’est l’un des derniers endroits qui nous rassemble. Parce que nous avons plus que jamais besoin d’être ensemble. Et parce que… nous allons passer beaucoup de temps sur le canapé, voici « Ta série, toi et nous ».

Je reçois ici un (e) invité (e) dont j’aime l’écriture, la voix et/ou le regard à partager sa relation avec l’héroïne ou le héros de sa vie. Merci infiniment à Renan Cros d’avoir accepté mon invitation

Renan Cros, professeur d’histoire du cinéma et spécialiste de la comédie

Qui est le seul personnage qui peut quelque chose pour toi ?
J’aurais dû mal à dire un seul personnage. Je dirais plutôt un groupe de personnages. Ce que j’aime dans les séries c’est la façon dont les gens apprennent à vivre entre eux. C’est pour ça que j’aime autant les sitcoms, autant la comédie. C’est le genre qui raconte le mieux ce que c’est que de vivre avec les autres. Evidemment, il y a eu « Friends » – pour moi la série la plus consolatoire parce qu’elle imagine une vie d’adultes totalement libre, dénuée de contraintes sociales. Mais de manière plus réaliste, j’ai un amour fou pour Leslie Knope et la bande de « Parks and Recreation ».
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D’accord elle a changé ta vie mais comment ?
Je ne sais pas si Leslie Knope a changé ma vie mais elle m’a prouvé qu’on peut faire rire, faire de la grande série, de la grande comédie avec juste des sentiments positifs. C’est l’histoire d’un personnage qui veut que tout se passe bien, un personnage optimiste, aimant… Autant dire pas vraiment un personnage de comédie, au départ. Mais la série fait de son énergie, de sa façon de voir le monde toujours par le haut une rage souriante aussi hilarante que contagieuse. C’est beau un personnage qui se demande juste, constamment, comment devenir meilleur, comment être quelqu’un de bien et qui transmet ça aux autres.

 

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Et elle pourrait quoi pour la nôtre ?
Je crois que Leslie Knope et la bande de « Parks and Recreation » sont un remède au cynisme. Au fond, la série et ce personnage nous disent que c’est facile de ne pas croire, c’est facile de tout dénigrer, de tout mettre à distance. Mais la vraie force, la vraie beauté des choses c’est d’y croire malgré tout. C’est vraiment une grande série morale pour ça. La façon dont ce personnage surmonte l’absurdité du monde par sa bienveillance folle, sa façon de croire et de compter sur les autres, de les aimer comme tels, sa façon de douter aussi parfois d’elle, ça vaut pour moi de grandes leçons de philosophie.

Ta #série, toi et nous : Better call Saul

13 Avr

Parce que c’est l’un des derniers endroits qui nous rassemble. Parce que nous avons plus que jamais besoin d’être ensemble. Et parce que… nous allons passer beaucoup de temps sur le canapé, voici « Ta série, toi et nous ».

Je reçois ici un (e) invité (e) dont j’aime l’écriture, la voix et/ou le regard à partager sa relation avec l’héroïne ou le héros de sa vie. Merci infiniment à Hélène Cobo d’avoir accepté mon invitation

Hélène Cobo, script-doctor et illustrateur

Qui est le seul personnage qui peut quelque chose pour toi ?
Jimmy McGill, alias Saul Goodman, a définitivement révélé ma faiblesse pour les escrocs magnifiques. Cet avocat low-cost qui sublime le spin off de « Breaking Bad » dans « Better Call Saul » a changé pour moi la donne du anti-héros, looser sympathique. Jimmy n’est pas foncièrement sympa, même pas touchant à première vue comme il se doit d’un anti-héros, mais quoi qu’il entreprenne, j’ai toujours envie qu’il s’en sorte. Sans morale aucune et frayant avec la pègre de la même façon qu’avec la ménagère du barrio, Jimmy c’est la résilience incarnée ! Manipulateur de génie, il a su élever la tchatche au rayon des Beaux-Arts et son intelligence en mode survie me bluffe. Jimmy est un héros complexe, désespéré, mais toujours sur le pont. On devine l’enfant en lui et c’est aussi cette formidable incarnation de l’enfant qui sommeille en nous qui m’a touchée. La vie est un jeu et Jimmy est de toutes les parties. Avec Jimmy j’ai beaucoup appris sur mon goût pour la différence, aimer ce qui ne me ressemble pas, aimer l’étrange et l’étranger. La vie est trop courte pour cheminer avec son sosie. Oubliés mon éthique chevillée au corps, ma tempérance, mon honnêteté pas glamour, quel bonheur de transgresser par héros interposé. Un bras cassé, vite ! Un fauché chronique qui est de toutes les aventures, un manipulateur qui vous touche car on devine bien blessures. Jimmy c’est l’homme de la situation, c’est l’homme de ma situation. Jimmy ne sera visiblement pas sauvé (ce sont les limites du spin off) par l’objet de son désir, la formidable Kim alias Gisèle et ça me désespère parce que, comme dit l’autre, « il le vaut bien! »
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D’accord, il a changé ta vie mais comment ?
Tout d’abord il a changé mon regard sur les séries. J’ai été longtemps bêtement réfractaire au découpage de l’intrigue, au feuilleton millénium. C’était avant de découvrir « Breaking Bad » dont certains épisodes, de véritables petits chefs-d’œuvre shakespeariens, avaient déjà mis à mal ma vision étroite du septième art ! Mais avec « Better Call Saul », j’ai été littéralement bluffée par la mise en scène éblouissante, par certains plans séquences virtuoses que ne renierait pas l’Alfonso Cuaron de Roma.
Enfin Jimmy a changé ma vision du anti-héros. À première vue, Jimmy coche toutes les cases. Ce n’est pas le beau gosse pour lequel on oublierait famille et patrie, il a un diplôme d’avocat obtenu par correspondance-joli moment de la série- et c’est un expert en fins de mois difficiles. Rien de glamour. Et pourtant, il est aussi tout le contraire : séduisant, formidablement intelligent, courageux au-delà des mots, bref, l’archétype du mec qui mérite qu’on s’attarde. Enfin Jimmy m’a révélé un petit penchant pour l’addiction aux séries que j’ignorais complètement. Le voir mentir et se démener entre pègre et vie personnelle me réjouis à chaque fois !

 

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Et il pourrait quoi pour la nôtre ?
Vous faire oublier Harvey Specter, le beau gosse brillant de « Suits » ou la douce Alicia Florrick, avocate à l’éthique irréprochable dans « The Good Wife ». Avec Jimmy, vous jouez dans une toute autre division et c’est réjouissant. Jimmy n’a pas peur des caïd; Jimmy a une amoureuse qui a la queue de cheval la plus tendance du barreau ; Jimmy n’a pas de morale ; Jimmy, c’est l’avocat qu’il vous faut. Because, « It’s all good, man », because, « It’s Saul Goodman ! »

Ta #série, toi et nous : Lost

11 Avr

Parce que c’est l’un des derniers endroits qui nous rassemble. Parce que nous avons plus que jamais besoin d’être ensemble. Et parce que… nous allons passer beaucoup de temps sur le canapé, voici « Ta série, toi et nous ».

Je reçois ici un (e) invité (e) dont j’aime l’écriture, la voix et/ou le regard à partager sa relation avec l’héroïne ou le héros de sa vie. Merci infiniment à Marc Herpoux d’avoir accepté mon invitation

Marc Herpoux, scénariste

Qui est le seul personnage qui peut quelque chose pour toi ?
John Locke, dans « Lost ». Ce simple employé né le 30 mai 1956, d’abord vendeur dans un magasin de jouets, avant de finir assistant dans une entreprise de fabrique de boîtes en carton, ce personnage, oui, peut beaucoup pour moi. John Locke a perdu l’usage de ses jambes après une chute de huit étages. Une chute provoquée par son propre père… et pourtant, il répète en boucle: « Don’t tell me what I can’t do ! » … Lui qui a été abandonné par son père, puis martyrisé par ce dernier une fois retrouvé, deviendra pourtant la figure paternelle de tous les autres naufragés. Une figure à la fois mystérieuse et bienveillante, protectrice et combattante. Il deviendra un professeur pour Walt, un guide pour Charlie, un tuteur pour Claire, un éducateur pour Boone. John Locke prend soin des autres, tout en se montrant autonome et indépendant. Cet être solitaire regarde le monde tel qu’il est. Un monde fait de clair-obscur, en perpétuel équilibre entre le Ying et le Yang. Tu ne peux avoir de nuit sans jour, et de jour sans nuit. Il sait qu’au fond de nous, nous sommes capable du meilleur comme du pire, raison pour laquelle nous avons tous droit à une seconde chance… lui le premier !
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D’accord, il a changé ta vie mais comment ?
John Locke m’a montré à quel point le rationalisme de Jack a ses limites, à quel point la bienveillance de Jack n’est pas une sagesse. « We’re free » répète Jack en boucle, comme pour mieux s’en convaincre. « No », répond John, « We have a destiny. You know that you’re here for a reason. And if you leave this place, that knowledge is gonna eat you alive from the inside out, until you decide to come back ». Personne ne pourra quitter l’île, John le sait. Moi non plus ! Voilà ce que m’a enseigné John. Mais prend la peine de l’écouter, écoute ce qu’elle a à te dire. Si l’île n’a pas de sens en soi, elle peut en avoir pour moi ! Merci John ! Moi qui était plutôt du côté de Jack au début, John m’a ouvert les yeux : Jack est chiant ! Il pleurniche sans arrêt sur l’absurdité de son existence, là où John sait sublimer chaque feuille que l’île porte en elle. John reste admirable, même lorsqu’il s’effondre et tombe à genoux, noyé par le désespoir, suppliant l’île de lui offrir un signe… Et paf ! Voilà que la trappe s’illumine ! Voilà que soudain son regard brille, que son visage rayonne enfin. John n’en demandait pas tant.

 

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Et il pourrait quoi pour la nôtre ?
John nous pousse à continuer, encore et toujours. A continuer de creuser, de chercher, de comprendre. Il sait que la vie n’est qu’un jeu. L’île n’est rien d’autre qu’un plateau de backgammon, parfois un échiquier… au pire un Risk ! A nous d’inventer les règles du jeu… mais toujours à partir de ce que l’île nous donne. John n’a pas la mystique d’un Eko. Il n’est pas prêtre, il n’a rien à prescrire. C’est un simple chasseur. Mais un chasseur hors-pair. Un chasseur qui pousse à chasser. John ne veut pas qu’on le suive. Il ne veut pas de disciple. Il ne prêche rien. Il parle d’ailleurs très peu. Il porte le nom d’un philosophe — John Locke — mais il aurait pu tout aussi bien s’appeler Nietzsche et dire comme lui : « Il m’est autant odieux de suivre que de guider ». John a trouvé son chemin, et nous encourage à trouver le nôtre en répétant inlassablement au fil des épisodes : « To be continued ».

Ta #série, toi et nous : Les Soprano

9 Avr

Parce que c’est l’un des derniers endroits qui nous rassemble. Parce que nous avons plus que jamais besoin d’être ensemble. Et parce que… nous allons passer beaucoup de temps sur le canapé, voici « Ta série, toi et nous ».

Je reçois ici un (e) invité (e) dont j’aime l’écriture, la voix et/ou le regard à partager sa relation avec l’héroïne ou le héros de sa vie. Merci infiniment à Marie Robert d’avoir accepté mon invitation

Marie Robert, philosophe, professeure, auteure

Dernier livre paru « Descartes pour les jours de doute » aux éditions Flammarion / Versilio

Qui est le seul personnage qui peut quelque chose pour toi ?
Tony Soprano ! Non pas que j’ai des envies d’assassinats (quoique !) mais surtout parce que ce personnage est pour moi l’éloge de la complexité. C’est un antihéros traversé par des émotions contradictoires. La loyauté, la colère, la vanité, le chagrin… Il est aussi médiocre que flamboyant. C’est assez proche de l’image que j’ai de « nous » en ce moment.
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D’accord, il a changé ta vie mais comment ?
Il y a dans des tous ses actes quelque chose de philosophique. Il agit en fonction d’un système de pensée, qui constable ou non, impose une action. Il crée une morale individuelle et agit en cohérence avec elle, mais dans une implacable cruauté. Je crois qu’on peut faire pareil mais en version amour et douceur !

 

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Et il pourrait quoi pour la nôtre ?
Comme Tony, allons chercher dans nos entrailles la source de notre cohérence. Affrontons la variété de nos émotions ! C’est le moment !

Ta #série, toi et nous : The Shield

8 Avr

Parce que c’est l’un des derniers endroits qui nous rassemble. Parce que nous avons plus que jamais besoin d’être ensemble. Et parce que… nous allons passer beaucoup de temps sur le canapé, voici « Ta série, toi et nous ».

Je reçois ici un (e) invité (e) dont j’aime l’écriture, la voix et/ou le regard à partager sa relation avec l’héroïne ou le héros de sa vie. Merci infiniment à Brice Homs d’avoir accepté mon invitation

Brice Homs, auteur

Dernier roman paru Sans compter la neige aux éditions Les Escales

Qui est le seul personnage qui peut quelque chose pour toi ?
Vic Mackey, de la série The Shield. Vic, c’est la définition du péché selon Saint Paul : « Je fais le mal que je ne veux pas faire et je ne fais pas le bien que je voudrais faire ». Sauf que Vic, lui, il est prêt à faire le mal. Pour faire le bien. Pour faire mal au mal. Quand personne ne veut y aller, lui, il ira. Et il y va à deux cent pour cent. Il fait face. « I don’t step aside, I step up ». Il affronte tout avec le torse bombé, un clin d’œil complice et un sourire narquois aux lèvres. Cette dureté, c’est la colonne vertébrale de sa droiture. Humain trop humain. Vic, c’est l’engagement. Comme le dit sa collègue Claudette, c’est une ordure, mais c’est le gars que tu es content d’avoir de ton côté quand tu es en danger. C’est un ami fidèle et loyal. Vic se fout de ce que tu penses de lui. Il fait ce qu’il doit faire. La définition du courage.
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D’accord, il a changé ta vie mais comment ?
J’ai un mal de chien avec le conflit. Je n’ai pas eu une vie très protégée. J’ai dû affronter très jeune des choses violentes. Brutales. Vic m’a réconcilié avec une partie de moi-même que je jugeais mal ou dont j’avais honte, celle qui se bat, qui affronte, qui rend les coups. Le regard des autres. Le mal qu’on se donne. Celui qu’on peut faire. Pour bien faire. Pour faire le bien qu’on voudrait. Grace à Vic, je sais que c’est ce qui fait de moi quelqu’un sur qui on peut compter. Quelqu’un d’aimable, au sens premier du terme.

 

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Et il pourrait quoi pour la nôtre ?
On a tous besoin, à certains moments, d’aller chercher le Vic en nous. Le badass au sourire narquois qui va faire face. Celui qui remonte ses manches au lieu de détourner le regard. Vic c’est notre ultime recours, ce qu’il y a de plus dur en nous, et de plus tendre à la fois. Ce qui dit que, bien sûr, on ne peut pas toujours gagner. Mais que même quand on perd, au moins on s’est battu.