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ILTVSW craque aussi pour/also loves… Roadies

26 Juin

FRA/ENGLISH

La famille parfois, c’est bien. Une zone de confort. Un endroit qui nous donne le courage d’essayer des trucs nouveaux. De donner leur chance à des inconnus. De nous planter. De nous relever. De nous planter encore et de nous relever encore. Peu importe puisque la famille est là. On peut compter sur elle.

Je ne fais pas ici référence à la famille famille. Ce qui se passe chez les Taylor dans Friday Night Lights, même si on les aime aussi profondément que sincèrement, c’est pour de faux, non ? Ou, si c’est pour de vrai, cela nécessite, au moins, un engagement à temps plein. Non, la famille que j’ai en tête est la famille que l’on se choisit. Les gens qui nous font du bien.

Cette semaine, ce sont les gens de Roadies. La nouvelle série de Showtime. Il est capital de dire tout de suite ce qu’elle n’est pas. Elle n’est pas une série d’auteur qui nous emmène dans des endroits dont nous ignorerions jusqu’à l’existence. Elle ne nous permet pas non plus de repenser notre relation à l’autre ou de réfléchir aux challenges que doit affronter le monde moderne.

Roadies est juste un divertissement. Elle raconte la vie quotidienne de gens ordinaires et normalement insatisfaits qui se lèvent le matin pour aller bosser dans les coulisses des concerts. Des gars et des filles sans qui le spectacle ne serait pas possible. Des gars et des filles qui, à part leur boulot, nous ressemblent.

Et ces jours-ci, être diverti, ça fait du bien. Il ne s’agit pas de déni. Mais du constat que les êtres humains ont besoin de leur dose de feel good de temps en temps pour trouver le courage d’affronter le réel. Et d’essayer de faire de leur environnement immédiat un monde meilleur. Dans lequel les gens ont plaisir à vivre ensemble. À leur toute petite échelle…

Potentiel BFFF (Personnage préféré pour toute la vie): bon. Regarder : pour sourire, rire et aimer.

La semaine prochaine dans ILTVSW… Oups, pas encore tranché, désolée.

 

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Titre/Title : Roadies
Créateur/Creator : Cameron Crowe
Cast : Carla Gugino, Imogen Poots, Luke Wilson
Maths : 1 saison/season
Chaîne/Network : Showtime

Sometimes, we just need family. As a comfort zone. A place where we can try new things. Trust people we just met. Screw up. Fall. And, well, screw up again and fall again. But it’s gonna be OK. Because we have family. As in people we can rely on. Obviously I am not talking of family family. What happens in the Taylor’s family in Friday Night Lights, as much as we truly & deeply love these people, is not for real, is it ? Or if it is, it must be the result of a full-time commitment. No, the family I have in mind, is the family we choose. As in people we are happy to hang out with. 

This week I am thinking of the people of Roadies. The new Showtime show. It is important to say what it is not. It is not an author show that will take us to places we haven’t heard of or makes us rethink our relationships or the challenges that modern world faces. Roadies is just entertainment. The every day life of regular and unsatisfied folks living their dreams behind the scenes of the musical world. They are the guys that make the shows possible yet nobody knows them. And most of all, they are like us.

God knows these days it feels good to be entertained. Not to be in denial. Just because we humans need to feel good from time to time to have the courage to face reality. And try to make our immediate environment a better place. Where people actually enjoy being together. At our own little scale. 

BFFF (Best fiction friend forever) potential: good. Watch to smile, to laugh and to love.

Next week in ILTVSW… Oops, not decided yet, sorry.

ILTVSW guest star (VF) : Hagai Levi co-créateur de The Affair

11 Oct

Hagai Levi, le co-créateur de The Affair, a donné une master class en avril dernier à Paris au Festival Séries Mania.

Fin mai, au début du tournage de la saison 2, ILTVSW a eu la chance de pouvoir réaliser une interview Skype avec lui. Et de parler universalité, savoir-faire et littérature de Tel Aviv à Paris.

Dominic West (Noah) Ruth Wilson (Alison) dans The Affair © Showtime

ILTVSW. Dans votre écriture, vous explorez toujours des enjeux universels à travers le prisme de l’intimité, pourquoi ce choix ?
Hagai Levi. Je suis effectivement toujours intéressé par des thèmes très universels mais, à l’instant où je les aborde, ils ont toujours une résonance très personnelle pour moi. Il ne s’agit pas de donner un point de vue de principe philosophique ou d’une autre nature sur ces enjeux. Chaque fois qu’on choisit d’aborder un thème très universel, il faut être extrêmement spécifique et, d’une certaine manière original, dans la manière dont on le traite. Car ce thème a déjà été traité de nombreuses fois dans chaque autre série, roman ou film… Je mets souvent très longtemps à trouver la bonne manière de le faire. Le plus souvent, la solution n’est pas l’histoire en elle-même mais le concept. Je me demande : « Comment vais-je faire ça ? » « Quelle forme convient le mieux à cet enjeu ? ».

ILTVSW. Pour votre dernière série The Affair, la forme était donc plus importante au début de votre travail que le sujet en lui-même ?
Hagai Levi. L’idée que l’histoire allait examiner toute cette affaire à rebours était effectivement présente dès le début car je voulais dire quelque chose au sujet d’une liaison ou du mariage. Quelque chose qui était assez ironique : on peut fuir son mariage mais pas se fuir soi-même. On peut se remarier avec quelqu’un d’autre et se retrouver exactement dans la même situation. C’était là dès le début comme l’idée des perspectives différentes. C’était l’ADN de ce travail.

Je ne me prends pas au sérieux mais je prends la vie sérieusement 

ILTVSW. Vous dites que vous écrivez des dramas parce que vous prenez la vie sérieusement. Diriez-vous que c’est la définition de drama ? Quel sens lui donnez-vous ? Mad Men s’achève cette semaine et Matthew Weiner prend aussi tout cela très sérieusement…
Hagai Levi. … Même si la fin de la série, en elle-même, est assez cynique, ne trouvez-vous pas ? La publicité et la méditation, hein ? Je suis quelqu’un d’optimiste mais cette conclusion m’a rendu très triste. Je considère que le monde de la publicité est très cynique et corrompu, donc l’idée qu’après un tel parcours c’est la seule chose que puisse faire Don Draper est très dévastatrice. Bien sûr, on peut l’interpréter de différentes façons mais il a un sourire très particulier, ne trouvez-vous pas ? Quoi qu’il en soit, je trouve que c’est une bonne définition. Je vais devoir y penser un peu plus pour pouvoir affirmer que c’est LA définition de drama. Je suis quelqu’un d’extrêmement non cynique vous savez. Je déteste le cynisme. Je pense que c’est horrible. Je pense aussi que certains des auteurs qui font de la comédie sont très cyniques. Il leur arrive de créer des séries formidables mais ils paient un prix. Un peu comme s’ils vivaient à côté de la vie en ne prenant rien au sérieux. D’un autre côté, les auteurs de drama peuvent avoir l’air ridicules tellement ils prennent leur vie au sérieux. Mais à choisir… Je ne me prends pas au sérieux mais oui, je prends la vie sérieusement. C’est différent.

ILTVSW. Comment définiriez-vous le cynisme 
Hagai Levi. Pour moi, le cynisme consiste à nier le bon et l’âme dans la vie d’un individu. Le nier et en rire. Autrement dit, considérer qu’il n’existe rien de plus important que l’intérêt. House of cards est pour moi la série la plus cynique que je n’ai jamais vue et c’est pour cette raison que j’ai arrêté de la regarder après deux épisodes. D’ailleurs, ce genre de séries passe à côté de quelque chose car il leur manque le conflit très basique entre le bien et le mal. C’est simpliste, superficiel et pas très intéressant car en l’absence de ce combat intérieur, on ne peut pas s’identifier. C’est cela le cynisme pour moi. Nier l’existence de cette part presque divine chez tout être humain. Je ne veux pas donner l’impression d’être new age, religieux ou autre mais pour moi, en tant que personne, essayer quelque chose qui est plus grand et meilleur que moi, c’est l’essence de la vie. Se moquer de cela, c’est être cynique. Il arrive que l’on ait besoin de ça de temps en temps dans la vie. J’ai adoré Seinfeld qui a probablement été la série la plus cynique jamais écrite. Louis CK n’est pas cynique. Son écriture est très honnête et sincère contrairement à celle de Seinfeld. Il est donc possible d’être très drôle mais avec beaucoup de coeur. On ne devrait rire que de soi-même ou de très puissantes institutions. Mais si l’on se moque de la vie normale alors l’on rate quelque chose dans sa vie.

Hagai Levi

ILTVSW. Les formations d’écriture apprennent que le conflit oppose l’obstacle et la volonté. Dans votre travail le conflit semble avoir lieu entre le désir et la morale. Une forme plus spirituelle de conflit, moins mécanique…
Hagai Levi. Je n’y avais jamais pensé sous cet angle mais je pense que vous avez raison. C’est l’enjeu de la vie pour moi. C’est toute ma vie. C’est ce à quoi je me confronte et que j’essaye de comprendre. C’est très naturel. Il y a une autre définition qui est souvent utilisée et qui consiste à rechercher le conflit intérieur et inhérent à un personnage. Par exemple, un mafieux victime de crise de panique peut être l’objet d’une série entière alors que ce conflit n’a rien de technique. Si vous voulez nourrir cinq saisons, vous avez besoin de quelque chose de bien plus profond qu’un simple obstacle. Quelque chose de profondément inhérent au personnage afin que ce conflit puisse durer pendant de très nombreux épisodes. Quand vous avez un détective qui est tellement sensible qu’il ne peut pas supporter la mort, vous savez que vous tenez quelque chose. Comme dans True Detective. Comme dans Homicide dans laquelle les détectives s’effondrent encore et encore car ils ne peuvent plus affronter ces tragédies. Encore une fois, c’est ce que je recherche. Il s’agit toujours de la bataille morale. C’est tellement plus intéressant que quelqu’un qui veut quelque chose mais ne peut l’obtenir, n’est-ce pas ? Et quoi, ensuite ? On pourrait dire de The Affair que c’est un gars qui veut cette fille et qu’il y a un obstacle car il est marié et qu’elle est mariée. Mais pour moi, le point le plus intéressant est quand il arrive à l’avoir. Là, ça devient intéressant (rires).

Quand on utilise des archétypes cela nécessite énormément de travail de les casser

ILTVSW. Vous utilisez des archétypes mais vous vous débrouillez pour ne jamais en faire des stéréotypes…
Hagai Levi. Je travaille le plus souvent sur des thèmes très universels et il est arrivé que, oui, au début les personnages soient des archétypes ou stéréotypes dans In Treatment ou The Affair. A partir de ce moment-là, il y a un long chemin à faire pour atteindre mon but principal qui est d’éviter les stéréotypes. C’est vraiment une question de boulot, vous savez. Souvent on attend d’un personnage qu’il fasse ci ou ça et vous vous décidez qu’il fasse le contraire. Quand on utilise des archétypes cela demande beaucoup de travail de les casser. J’en ai totalement conscience et ce n’est qu’une question de travail.

ILTVSW. Cette conscience que vous avez, est-elle due au fait que vous avez étudié la psychologie ? 
Hagai Levi. Cela aide, c’est sûr. Vous avez plus d’outils à votre disposition. Mais même sans cela, cela devrait être important. La plupart du temps, les stéréotypes sont OK dans l’industrie de la télévision américaine. On en voit tellement mais comme c’est une industrie, les gens qui décident trouvent que cela n’a pas d’importance. C’est une bonne chose si cela a du succès. 99 % des séries sur les Networks sont basées sur des stéréotypes. Pour pouvoir les casser, il faut d’abord le vouloir, en fait. Il m’arrive de penser que c’est chez moi une question d’ego. Je déteste faire quelque chose qui a déjà été fait (rires) qu’il s’agisse d’un personnage, d’une forme ou d’un thème.

© HBO

ILTVSW. Pensez-vous qu’au bout du compte, l’écriture n’est que l’auteur lui-même et devrait l’être. Que c’est la seule manière d’atteindre une vérité et une authenticité. Ou, au contraire, le savoir-faire peut-il suffire ?
Hagai Levi. Je pense que l’on surestime le savoir-faire. Il y a tellement de séries que les gens qualifient de formidables alors que tout ce qu’on peut voir c’est qu’elles sont simplement très bien faites. Il n’y a aucun point de vue personnel, ni prises de position personnelles dedans. Donc, pour moi, le savoir-faire n’est pas très important. Vous pouvez faire des choses étonnantes avec, c’est vrai. Mais pourquoi perdrais-je mon temps à regarder quelque chose qui est juste très bien réalisé ? J’ai beaucoup mieux à faire. True Detective (saison 1) est un bon exemple. La série est très bien faite. Mais y-a-t-il quelque chose de nouveau dans son thème ? Je ne le crois pas.

ILTVSW. Pourtant, Nic Pizzolatto met beaucoup de lui-même dans son écriture…
Hagai Levi. C’est intéressant. Je l’ignorais. Ecoutez, j’aime vraiment True Detective donc je ne veux pas dire du mal de la série. Mais lorsque l’on arrive aux derniers épisodes, à la solution, encore une fois, il s’est agit d’un serial killer. Il y a eu de nombreux moments de vérité dans la série mais la conclusion a été un peu décevante. Je pensais que j’allais apprendre quelque chose de nouveau sur le bien et le mal, la nature religieuse du Sud qui a un impact évident sur le paysage politique actuel ou l’âme américaine.

ILTVSW. Quelles séries font plus que cela selon vous ?
Hagai Levi. La barre est toujours The Wire. Avec The Wire, qui n’était pas si bien réalisée que cela quand vous la regardez aujourd’hui  – ce que j’ai fait, je ne l’ai regardée qu’il y a deux ans, elle n’est pas aussi étonnamment faite que d’autres séries – vous voyez le monde différemment après. Et je ne crois pas qu’il y ait assez de cela à la télévision. Mad Men était comme ça. Rectify l’est aussi. La première étape pour réussir est de ne pas utiliser le genre. Il faut écrire autre chose. On dit que c’est l’âge d’or de la télévision. Je pense que c’est l’âge d’or du savoir-faire à la télévision, c’est sûr. Mais pas suffisamment dans son essence. La télé n’a pas rejoint la littérature où il y a tellement de variété. OK, il y a plein de romans policiers mais ils ne constituent qu’une petite part de la littérature. Il y a tellement de livres sur toutes sortes de sujets. Vous pouvez lire un livre et, waouh, vous vous sentez élevé et inspiré. Vous ne trouvez pas assez cela à la télévision.

ILTVSW. Vous travaillez sur un film consacré à Etty Hillesum, pourtant le mal n’est pas un sujet intéressant pour vous. Cette femme a eu un parcours incroyable mais elle est morte assassinée dans un des endroits les plus diaboliques dans l’histoire de l’humanité, comment allez-vous aborder ce sujet ?
Hagai Levi. Tout d’abord, ce n’est pas que je ne suis pas intéressé par le mal. Simplement la fascination pour le mal de certaines séries américaines est très perturbante. Ils n’essayent pas d’explorer le mal, ils s’en amusent. C’est extrêmement regrettable selon moi. Cette femme a eu une manière très spécifique de gérer le mal. Ce film ne sera pas du tout sur l’Holocauste mais sur d’autres choses. C’est un film qui pose la question de comment rester un être humain dans chaque circonstance même les plus horribles. D’une certaine manière, c’est un film sur le renoncement. Elle aurait pu se rebeller mais a choisi un autre chemin. Un chemin qui peut se résumer ainsi : je peux être tellement autonome et autosuffisante que je me fiche des circonstances. Oui, le mal existe mais je ne gaspille pas mon énergie ou mon temps à la haine ou la revanche ou à penser à la revanche. J’essaye de construire quelque chose en moi qui est si fort que je peux tout surmonter. C’est comme cela qu’elle a supporté le mal. Elle a dit et répété : le mal est en nous pas à l’extérieur de nous, donc nous devons d’abord nous occuper de nous-mêmes pour l’effacer et, ensuite, le monde sera meilleur. Ce qui se passe à l’extérieur n’a aucune importance, c’est l’enjeu de ce travail. Et comme vous pouvez le comprendre, il est très difficile d’en faire un film. Donc, je me bats.

Titre : The Affair (2014 –    )
Créateurs : Hagai Levi, Sarah Treem
Cast : Dominic West, Ruth Wilson, Maura Tierney, Joshua Jackson
Chaînes : Showtime, Canal Plus séries (France)

© 2015 ILTVSW – ne pas reproduire sans autorisation préalable d’ILTVSW

La semaine prochaine dans ILTVSW… Oups, pas encore tranché, désolée.

ILTVSW guest star (VO) : Hagai Levi co-creator of The Affair

4 Oct

Hagai Levi, the co-creator of The Affair, gave a master class last April in Paris at the Festival Séries Mania.

At the end of May, ILTVSW was lucky enough to set a skype meeting with him when the second season started shooting and talk universality, craft and literature from Tel Aviv to Paris.

Dominic West (Noah) Ruth Wilson (Alison) in The Affair © Showtime

ILTVSW. In your writing you always explore universal issues but also always do it through the prism of intimacy, why that ?
Hagai Levi. I am always interested in very universal themes but they are always very personal for me. It’s not like if I decided to address some very important philosophical or whatever issues but things that are very important for me at this moment in my life. Whenever you deal with something that is very universal you have to be very very specific and in a way original in the way you handle it because it has been handled so many times in every other TV show or book or film… Usually it takes me a lot of time to find the right way, the right form to deal with it. Usually it is not about the story but about a concept. How will I do it ? What is the right form for this issue ?

ILTVSW. So for your latest show The Affair, the form of the storytelling was more important at the beginning than the subject ?
Hagai Levi. The idea that the story was going to look at the whole thing backwards was really there at the beginning because I wanted to say something about an affair or about marriage, something which was quite ironic, the fact that you can run away from your marriage but you can’t run away from yourself. You can find yourself living married with a new one and get to the exact same point. That was there from the beginning as was the idea of the perspectives. In the very initial core of the work.

I don’t take myself seriously, I take life seriously

ILTVSW. You say that you write drama because you take life very seriously. Would say it is the definition of drama ? How would you define it ? Mad Men is ending this week and Matthew Weiner is also taking this whole thing very seriously…
Hagai Levi. Although, the ending of the show itself is quite cynical wouldn’t you say? The commercial and the meditating, right ? I am an optimistic person myself but it was a very sad ending for me. I see the world of commercials as a very cynical and corrupted world so for me the idea that after all this journey this is only thing Don Draper can do is very devastating. You can interpret it in many ways but it’s a very specific smile wouldn’t you say ? Anyway. It is a good definition I have to think about it much more to say that this is the definition of drama. I am a very non cynical person, you know. And I hate cynicism. I think it’s awful. And I think sometimes people who make comedies are very cynical as people. Sometimes they can make amazing shows but they pay a price. It is like living beside life in a way. And not taking anything seriously. In drama it can be very ridiculous how people take their life seriously but when I have to choose between two options yes, I don’t take myself seriously, I take life seriously. It’s different.

ILTVSW. How would you define cynicism 
Hagai Levi. Cynicism for me is denying the good, the soul in a person’s life. Denying it and laughing about it. Meaning there is no something which is more than interest. House of cards is I think the most cynical show I have ever seen and that’s why I stopped watching it after two episodes. For me, by the way, these kind of shows are missing something because this very basic conflict between the good and the bad is missing. It’s simplistic and superficial and although it is not very interesting because if you don’t have this battle inside of you then I am not interested and I cannot identify. Anyway. This is cynicism for me. It’s denying this almost divine part in yourself. I wouldn’t want to sound new age or religious or something but for me as a person trying something that is bigger and better than myself is the essence of life. Mocking this is for me being cynical. Sometimes you need cynicism in your life. I loved Seinfeld which is again probably the most cynical show ever. Louis CK is not cynical. His writing is very honest and very sincere as opposed to Seinfeld for instance. So you can be very funny but still with a lot of heart. You should always laugh about either yourself or very powerful institutions but if you mock the normal life then you miss something in your life.

Hagai Levi

ILTVSW. In drama writing schools they teach that conflit is between obstacle and will. But in your writing conflict seems to be between morality and desire. A more spiritual form of conflict as opposed to a mechanical one…
Hagai Levi. I didn’t think about it this way but I think you are right. This is life for me. This is all my life. This is what I am dealing with and trying to understand. It is very natural. There is another definition which is usually used which is I really look for internal and inherent conflict in a character. When you say there is this mobster who has panic attacks, you can put a whole series on this conflict but it is not something technical. If you want to feed five seasons you need something that is much more deep than just an obstacle. Something inside the main character so inherent in him that this conflict can carry so many episodes. When you have a detective who is so sensitive that he cannot tolerate death then you know you have something. Like in True Detective. Like in Homicide in which the detectives collapsed again and again because they couldn’t handle these tragedies. Again this is what I am looking for. For me it is always a moral battle. It is so much more interesting than someone who wants something and can’t get it, right ? And then, what ? You could say about The Affair that it’s a guy who has this will about this woman and that there is this obstacle because he is married and she is married. But for me the most interesting point is when he has her. Now it is becoming interesting (laughs).

When you use archetypes it is really a lot of work to break them

ILTVSW. You use archetypes, yet you manage never making them stereotypes ?
Hagai Levi. I usually go for very universal themes and sometimes, yes, in the beginning you have archetypes or you could say stereotypes characters in In Treatment or in The Affair whatever. From this point there is a very long way to reach my main goal which is to avoid stereotypes. So it is really about work, you know. A lot of time a character would be expected to do this or that and you choose to make him or her go another way. When you use archetypes it is really a lot of work to break them. I am very very aware of the archetypical nature of these characters and from this point it is just work.

ILTVSW. This awareness you have it because you studied psychology ? 
Hagai Levi. Well, it helps. Because then you have more tools to play with. But again it should be important. In a lot of places in the American TV industry stereotypes are OK. There are so many stereotypes out there and since it is an industry, they say whatever. It is good if it works. If you look at 99 % of the shows in the networks they are based on stereotypes. So first you need to want to break them and then you can do it, you know. Sometimes I think it has something to do with my ego. I really hate to do something that has been done (laughs). Either it is a character, a form or a theme.

© HBO

ILTVSW. Do you believe that ultimately writing is about the writer himself and has to be. That it is the only way it can be true and feel authentic. Or craft can do the trick ?
Hagai Levi. I think craft is overrated. There are so many shows on television that people refer to as great shows and all you can see is that they are very well done but I don’t see any personal point of view behind them or personal statement or whatever. So for me, craft is not very important. You can do amazing things with craft but why should I waste my time with something which is only well done. I have much better things to do. True Detective (talking about season 1) is a good example. It is really well done. But is there anything new in its theme ? I don’t think so.

ILTVSW. Yet, Nic Pizzolatto puts a lot of himself in his writing…
Hagai Levi. It’s interesting. I didn’t know that. Listen, I really like True Detective so I don’t want to say bad things about it. When it comes down to the last episodes, to the solution of the whole thing, again it was about another crazy serial killer. You had a lot of moments that were really true in the show but in the end it was a bit disappointing. I thought I was going to learn something new about good and bad, the religious nature of the South which is so relevant to current politics, or the American soul.

ILTVSW. Which shows do much more than just being well crafted ?
Hagai Levi. The bar is always The Wire. With The Wire, which wasn’t so well done by the way when you watch it today which I did, I watched it only two years ago and it is not amazingly done as other shows, you look at the world differently after watching it. And I don’t think there is enough of that in television. Mad Men was one of these shows. Like Rectify. I think the first step to do that is not to do a genre show. It is writing something else. They say it is the golden age of television. I think it is the golden age of television in the craft, for sure. It is not enough a golden age in the essence. TV is not yet in the place where literature is where there is so much variety. OK you have all these detective books but it is a very small part of literature. You have so many books about so many things. You can read a book and wow, you have this elevation, this inspiration. You do not have that enough on television.

ILTVSW. You are working on a movie about Etty Hillesum, yet evil is not an interesting matter to you. This woman had an incredible journey but died in the most devilish place you can think of, so what is going to be your take ?
Hagai Levi. First of all it is not like I am not interested in evil. The fascination for evil of some of the American shows that were interested in evil is very disturbing. It is not « let’s explore evil », it is more like « let’s make fun of it ». And this is very very wrong for me. This woman has a very specific way to deal with evil. This film is not going to be about the holocaust at all but about other things. It is about how you can be a human being in every circumstances, even in the most horrible circumstances. In a way it is about giving up, you could rebel but she has chosen an other way. Which was : I can be so autonomic and self-content in a way so I don’t care what are the circumstances. So yes there is evil but I don’t waste my energy or time on hatred or revenge or thinking of revenge. I try to build something inside me which so strong so I can live or die anything. That’s her way of coping with evil. She said again and again : evil is inside us not outside so first you have to take care of yourself, to erase the evilness inside you and then the world will be better. It doesn’t matter what is happening outside, that is the issue of this. And as you can understand it is very very hard to make a film from this idea so I am struggling.

Title : The Affair (2014 –    )
Creators : Hagai Levi, Sarah Treem
Cast : Dominic West, Ruth Wilson, Maura Tierney, Joshua Jackson
Networks : Showtime, Canal Plus séries (France)

© 2015 ILTVSW – not to be reproduced without a prior authorization from ILTVSW

Next week in ILTVSW, the French version.

ILTVSW Pilot crush: The Affair

12 Oct

FRA/ENGLISH

Il arrive que deux personnes bien prennent de mauvaises décisions. Ne fuyez pas, loin de moi l’idée de vous infliger une leçon de morale dans ce petit billet. Pour la simple raison que si le storytelling devait être jugé selon ce critère, eh bien nous préférerions escalader l’Everest pendant une tempête de neige plutôt que de nous vautrer sur un canapé en oubliant jusqu’à l’existence du reste du monde pour regarder deux étrangers se lancer dans ce qui demeure l’expérience ultime pour tout être humain: l’amour.

Confession de la semaine, je suis sur le point de craquer pour deux personnes sur le point de s’aimer. Et je n’en ai même pas honte. Parce que la dernière née des séries Showtime,The Affair, dès mardi sur Canal Plus séries, fait quelque chose d’inédit. Oubliez les violons, Cendrillon et sa version low cost AKA The Bachelor. La série met en scène Eve et Adam IRL. Elle propose un examen clinique du chemin personnel qui conduit deux inconnus – une femme et un homme dans la série, mais une autre combinaison serait possible tant l’écriture puissante lui confère une portée universelle – à se reconnaître l’un dans l’autre. Au point que leur rencontre va faire imploser toutes leurs croyances, effacer leur passé et détruire les gens qui comptaient jusque-là pour eux. Peut-être même, les pousser au crime.

C’est ce qui arrive à Alison et Noah. Deux personnages savamment créés par Sarah Treem et Hagai Levi. Deux scénaristes qui parviennent à restituer les mensonges que l’on se raconte à soi-même comme rarement à la TV. Dans la lignée de leur travail dans  In Treatment série imaginée par le second. Alison et Noah, deux personnages incroyablement interprétés par Ruth Wilson et Dominic West qui transcendent les choses du quotidien. Deux êtres humains tout à fait recommandables. C’est-à-dire pas des serial lovers névrosés. Tous les deux sont mariés. Lui, apparemment, plus harmonieusement qu’elle. Il est prof et écrivain. Il a quatre enfants et une femme qui l’aime. Elle est serveuse et tente de tenir debout après un drame. Pour des raisons différentes, tous les deux sont perdus dans une solitude. Témoins passifs de leur existence. Jusqu’à cette rencontre qui va tout bouleverser.

The Affair semble être un objet télévisuel prometteur car elle dit quelque chose d’important d’un domaine délicat, celui de l’intime. Ce qui est toujours très risqué car beaucoup plus difficile à manipuler que les grands thèmes comme « la corruption en politique, c’est mal ». Même si nous sommes tous d’accord pour reconnaitre qu’évidemment, l’enjeu n’a pas la même portée. La série pourrait bien dire que non les histoires d’amour, à la TV, ne comptent pas pour rien. Et que oui, on va souffrir car l’amour est quelque chose de bien réel et non un simple fantasme. Que chacun y cherche et y trouve quelque chose de différent. Et, ça, c’est sacrément fascinant à observer.

 

 

The Affair (2014 – )
Créateurs/Creators: Sarah Treem & Hagai Levi
Cast: Ruth Wilson (Alison Bailey), Dominic West (Noah Solloway), Maura Tierney (Helen Solloway), Joshua Jackson (Cole Lockhart).
Maths: 10 episodes
Chaîne: Showtime, Canal Plus séries (France)

 

Sometimes two good people can do bad things. Do not worry this is not going to be a morally charged piece of writing. For the simple reason that if TV storytelling had to be greenlighted under this criteria, well we would rather climb the Everest during a snow storm than seat on a coach unaware of the rest of the world just to watch two strangers engaging in what still is the ultimate human being experience: love. Confession of the week, I am about to fall for two people falling in love. And I am not ashamed. Not a bit. Because Showtime last show The Affair is doing something new. Forget about the violins, Cinderella and the low cost version of it AKA The Bachelor. The show is about about Eve and Adam IRL. It is a clinical exploration of the personal path that leads to perfect strangers a woman & a man in the show, but It could be another combination because of the universal power of the writing, to recognize themselves in each other. Up to the point that their encounter is going to crash all their beliefs, erase their past and destroy their loved ones. And maybe even end up by a crime.

That’s what happens to Alison and Noah. Powerfully designed by Sarah Treem and Hagai Levi, the show creators. Two scribes that do master the art of depicting the lies we tell ourselves. We already know that thanks to their previous work In Treatment created by Hagai Levi . Alison and Noah, two characters masterfully played by Ruth Wilson and Dominic West. The pair completely transcends the things of our daily routine. Both of them are decent people. Meaning not neurotic serial lovers. Both of them are married. He seemingly more happily than her. He is a writer and a teacher. He has four kids and a loving wife. She is a waitress and is trying to survive after a drama. But for different kind of reasons both are lost in their loneliness. Passive witnesses of their lives. Until the day they meet.

Ultimately we have the feeling that The Affair is rare because it says something important on the most difficult level, the intimate one. Which is risky business because in some ways obviously more delicate to deal with than, say, the « corruption in politics is wrong » theme even though we will agree that it is less important stuff. The Affair might be saying that no a love affair, on TV, doesn’t have to be minor. And that, yes it is going to hurt because that thing called love is not a fantasy. It actually does exist. Everyone is looking for and finding something different in it. That’s a damn fascinating thing to watch.

Un gars, une fille, des séries: Les bons, les brutes et les truands

25 Mai

Chers lecteurs

C’est l’histoire de l’Histoire qui aurait pu provoquer toute une histoire … Et oui, le débat passionné est l’une des activités de prédilection des sériephiles. Sujet de la discorde de la semaine : les séries historiques. Souvent faites de larmes, de sexe et de sang plus que de toiles d’araignées, elles sont d’une qualité très inégale. Et provoquent fréquemment des réactions épidermiques. On adore les détester. Ou, on se déteste de les adorer. Ou, simplement, on les adore. Rome, Black Sails, The Tudors, Spartacus, Vikings, Mad Men, Downton Abbey … des propositions fictionnelles souvent radicalement différentes. Avec Dominique Montay, rédacteur en chef séries du Daily Mars et scénariste, nous avons croisé nos regards sur l’un des genres à succès de ces dernières années. On s’est très sérieusement fâché pour de faux mais, surtout, nous avons longuement échangé. Les séries historiques en cinq questions.

To my readers, exceptionally ILTVSW will only be French speaking this week. The blog is hosting a TV critic battle about historical TV shows. But as soon as next week things will be back to normal meaning French & English.

 

Black Sails

Black Sails

 

ILTVSW. Les séries historiques sont condamnées à être des divertissements kitsch, c’est vrai?

Un gars. D’entrée de jeu, on ne va pas être d’accord. C’est pas beau de commencer sur un clash, il va rester quoi, ensuite ? Déjà il faudrait définir le kitsch, qu’on utilise un peu à tort et à travers. Ici, si je comprends bien, c’est plus sur le côté « mauvais goût » qu’on aborde la problèmatique. Alors oui, Spartacus n’est pas le dernier sur le sujet. Son esthétique générale est assez douteuse, surfant sur celle d’un film d’une incroyable laideur, 300. Particulièrement sur les scènes de combats, et les zooms numériques sur les projections de sang, qui donnent l’impression que les combattants n’ont pas de veines mais que des artères. C’est parfois assez risible, mais si on s’attache au récit en évacuant le visuel, c’est une série qui possède un vrai fond, un vrai discours sur la liberté et la responsabilité. Les combats et le sexe dans Spartacus, c’est un peu comme les pyjamas dans Star Trek, il faut aller au-delà pour voir ce qu’il y a de brillant. Même si ça peut être très dur.

Une fille. OK. Allez, le clash, donc. Existe-t-il des critères qui définissent le kitsch? Je n’ai pas la réponse à cette question. En revanche, je pense que les qualités esthétiques sont plus faciles à identifier. Si on répond à la question en l’envisageant sous cet angle, je crois que l’on peut dire que certaines séries historiques sont superbes. L’un des exemples qui me vient immédiatement à l’esprit est la série Downton Abbey de Julian Fellowes. Elle pousse l’élégance jusqu’à contredire la réalité historique. Un spécialiste anglais de la question des domestiques dans les grandes maisons aristocrates anglaises a écrit un papier reprochant à la série d’esthétiser et d’idéaliser le quotidien d’employés de maison qui vivaient généralement dans des conditions misérables et, forcément donc, dans une réalité moins glamour …

 

Downton Abbey

Downton Abbey

 

ILTVSW. La violence et le sexe ne sont-ils pas qu’une manière de masquer le néant?

Un gars. C’est une tendance assez incroyable dans la fiction TV américaine : qui dit série historique dit nudité et violence. En même temps, et je reprends l’exemple de Spartacus : est-ce si éloigné de la vérité de l’époque ? Les esclaves à moitié à poil qui servent d’objet sexuel quand le maître en a envie ; les guerriers qui s’étripent dans des colisées pour sauver leur peau, gagnés par l’adrénaline des vivats de la foule… je ne vois pas d’actes qui me surprennent. Qui me choquent, oui, mais c’est normal, c’est l’effet désiré. Réduire le débat à « trop de violence et de sexe », c’est une erreur, pour moi. Plutôt que d’accumuler et de faire un décompte (un peu comme on est tenté de le faire avec les « fuck » dans un film de Scorsese), il faut prendre ces scènes une par une et évaluer la chose suivante : est-ce qu’elles racontent quelque chose ? Est-ce qu’elles sont utiles, ou est-ce un passage obligé ? Et ça arrive. Suivant la chaîne ou vous vous trouvez, il « faut » de la nudité. J’aimerais un jour faire ce genre de décompte en comparant Spartacus et une série aussi surcotée que Boss, sur la même chaîne (Starz). J’ai peu souvenir de scènes de sexe justifiées dans l’oeuvre de Farhad Safinia. Mais ça, on en parle peu. Certainement parce que la « mise en scène » est de meilleur goût. Pour en revenir au “néant”, j’ai du mal à imaginer les scénaristes se dire « mettons une scène de cul ici, parce qu’on n’a rien à dire ». Même sur True Blood ils ne fonctionnent pas comme ça. Ils écrivent une bouse, mais pas ce genre de bouse. C’est une série, pas un téléfilm playboy. Après ce qu’ils font est bon ou mauvais, nous touche ou pas. Je pense même que la profusion de sexe et de violence masque les qualités, pas les défauts. Ca en fait un objet peu recommandable, et on y revient « de mauvais goût ». Ca réduit la force d’une oeuvre. Je crois plus aux vertus masquantes d’une réalisation léchée, belle à voir, loin de l’outrance.

Une fille. Je pense moi tout le contraire. Il paraît assez évident, depuis quelques années, qu’il existe un filon de productions historiques bas de gamme que certains producteurs, créateurs et chaînes ont décidé d’exploiter. Ils rivalisent, d’ailleurs, de non imagination en repoussant toujours les limites et en proposant les scènes les plus gore possibles. On ne peut même pas dire que cela soit l’apanage des Américains puisque The Tudors est une création irlando canadienne même si elle est diffusée par Showtime ou que Canal Plus a proposé une version de Borgia qui n’était pas la définition de la subtilité. Il serait intéressant de couper toutes les scènes d’écartèlement  et que les scènes d’intimité s’arrêtent devant la porte de la chambre d’un couple qui a manifestement des projets pour occuper sa soirée. Ce n’est pas une posture moraliste, c’est simplement pour souligner que privées de ces scènes certaines séries historiques risqueraient d’avoir des difficultés pour boucler la durée d’un épisode. On peut prendre l’exemple contraire avec Mad Men. Depuis sept saisons, Don Draper est disons un homme assez actif sexuellement. Jamais pourtant Matthew Weiner ou ses auteurs ne s’aventurent sur ce terrain-là. Ce qui les intéressent c’est d’écrire le portrait d’un homme très seul, de dessiner ses faiblesses, de mettre en évidence ses limites… Et, plus largement, de proposer une définition de la masculinité dans l’Amérique des années 60. Don Draper est en partie caractérisé par sa sexualité névrotique. Comme Lucius Vorenus dans Rome, une série beaucoup plus mainstream, l’est par sa maladresse avec sa femme. Dans les deux cas, l’intimité sert de véhicule au point de vue de l’auteur. Un auteur qui a quelque chose à dire. Et cela, ça change tout.

 

Je ne suis pas sensible au concept du guilty pleasure, Dominique Montay

ILTVSW. Qu’offre donc l’Histoire comme opportunité au scénariste que le monde contemporain ne lui permet pas?

Un gars. Pas de téléphone portable. Et ça… le téléphone portable, c’est l’ennemi du scénariste et, depuis 20 ans, il doit faire avec. Quand vous voyez une scène avec quelqu’un qui n’a pas de réseau, c’est juste parce qu’à ce moment précis, le téléphone fait chier. Dans une fiction historique, le problème ne se pose pas. Et je suis TRES SÉRIEUX.

Une fille. Une immense liberté. Les scénaristes peuvent absolument s’affranchir de la réalité, vraiment qui ira vérifier? Et, ils sont finalement peu nombreux ceux qui se saisissent réellement de cet espace de jeu pour raconter des histoires. Souvent, les créateurs de séries historiques sont fiers de dire qu’un conseiller historique les a accompagnés. Et que les gens, à l’époque comme disent souvent les écoliers, ce qui est drôle et éloquent à la fois, buvaient, dormaient, marchaient vraiment comme ça. Ce « vraiment » n’a finalement aucune importance. Ce qui compte, ce qui devrait compter, c’est l’épaisseur des personnages et la puissance de fascination exercée par l’arène dans laquelle ils évoluent. Tout se passe souvent comme si l’obsession pour l’exactitude de la réalité historique exonérait le créateur de sa mission première, celle de raconter des histoires.

 

Rome

Rome

 

ILTVSW. Et la vérité historique dans tout ça, c’est important?

Un gars. Oui, et non. On s’en fout un peu, en fait. Ca dépend de votre propos au départ. Si vous voulez cadrer au plus près avec l’Histoire, il faut s’y tenir, et faire très attention à la cohérence de vos intrigues. Vous n’avez pas le droit à l’erreur. Pour Spartacus, ils sont resté proches d’une vision de l’Histoire (tous les historiens ne sont pas d’accord sur le déroulement) tout en remplissant les zones d’ombre. Bien entendu, ils ont créé des personnages, certains sont restés plus longtemps que prévu, des raccourcis ont été pris… mais ils sont surtout restés cohérents dans leur histoire. Mais, ils auraient pu la jouer « fuck it » à la Tarantino dans Inglourious Basterds et réécrire l’histoire, montrer Spartacus décapiter Jules César, puis voyager dans le temps pour cramer Hitler, mais non. Ce n’était ni le sujet, ni le propos. Encore un aspect brillant de Spartacus : quand on regarde les fictions basées à cette époque, comme Rome, tous les mecs parlent comme s’ils vivaient dans l’Angleterre victorienne, tout droit sortis d’une pièce de Shakespeare. Dans Spartacus, ils parlent un langage inventé pour l’occasion, c’est de l’anglais, certes, mais les phrases sont construites comme du Latin. En cela, je trouve Spartacus plus réaliste historiquement que Rome ou Gladiator 

Une fille. Il m’arrive d’avoir une énorme envie de réalisme. Quand c’est le cas, je fais une pause sur les séries et je me plonge dans une collection documentaire. Je pense au travail du documentariste américain Ken Burns, par exemple. Sa série documentaire The War est un travail à la fois d’une rigueur irréprochable et complètement captivant. Mais, quand je me lance dans une série, vraiment son réalisme passe au second plan. C’est pour cette raison que j’ai passionnément aimé Rome. L’idée d’un Buddy movie dans la Rome antique est géniale. Lucius Vorenus et Titus Pullo sont incroyablement humains dans les deux saisons de la série. Ils font comme ils peuvent avec leur époque mais surtout avec leurs limites, leur passé, leurs blessures … OK Freud, c’est encore dans longtemps mais ce n’est pas grave car on vit avec eux. Mon dernier coup de cœur est l’Anglaise Peaky Blinders. Elle met en scène une famille de gangsters dans le Birmingham des années 20. Les hommes sont jeunes et encore traumatisés par la première guerre mondiale. Je n’ai aucune idée du modèle des fusils dont ils étaient équipés mais je n’oublierai pas le traumatisme que j’ai pu lire dans leur regard. Ces personnages sont d’une puissante humanité. C’est tout ce qui importe.

 

Vikings

Vikings

ILTVSW. Quels barbares hirsutes et malodorants trouvent malgré tout grâce à vos yeux, et dans quelle mesure culpabilisez-vous?

Un gars. Ah mais plein ! J’adore le génie tactique de Spartacus, le sens de l’honneur de Oenomaus, la fragilité d’Agron et la jouissance communicative de Saxa, j’ai appris à aimer Gannicus, le révolutionnaire récalcitrant. J’aime beaucoup Long John Silver et Anne Bonny dans Black Sails. Après, on serait tous coincés dans un métro, je leur demanderais d’aller prendre une douche ou deux, mais sinon, je les adore. Je viens de me mettre à Vikings, donc c’est un peu compliqué de détacher des personnages, même si j’aime beaucoup Lagertha, qui a tout pour être un cliché de “femme de guerrier”, et qui est tout le contraire. Et n’étant pas sensible au concept de guilty pleasure, sachez que je ne culpabilise jamais. Spartacus est une série formidable, Black Sails n’est pas exempt de qualités, et Vikings s’annonce très bien.

Une fille. Comme il m’est impossible de me fâcher pour toute la vie avec un gars. Je vais aller dans son sens et saluer Vikings. Contrairement à ce qu’il avait fait dans la très moyenne The Tudors, Michael Hirst ne s’est pas caché derrière les fantasmes véhiculés par une époque pour faire l’économie de personnages un peu construits. Ses Vikings ont, c’est vrai, une conception de l’hygiène assez proche de celle de Néandertal mais ils ont des trajectoires personnelles touchantes et, en plus, chose assez rare, la série repose aussi sur de beaux personnages féminins.

On peut retrouver le passionnant et passionné Dominique Montay sur le Daily Mars et le suivre sur Twitter @ItsZeDom

La semaine prochaine dans ILTVSW … Oups, pas encore tranché, désolée.

 

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